De Felix McCabe, directeur de la génération de revenu chez Dropbox
Vous vous souvenez peut‑être du mythe d’Icare, l’homme qui vola trop près du soleil? Quand j’étais enfant, c’était l’une de mes légendes préférées. Elle raconte l’histoire d’un homme et de son fils qui, prisonniers sur une île, élaborent un plan d’évasion en inventant une nouvelle technologie : des ailes faites de plumes et de cire. Icare s’échappe de l’île à tire d’ailes, mais tombe dans la mer et se noie, après avoir fait fondre ses ailes en volant trop près du soleil.
Icare, notre héros, n’a pas tenu compte des limites de cette technologie inédite. Son histoire va de mal en pis et son excès de confiance le mène à sa perte.
En réécoutant ce mythe récemment, j’y ai vu de nombreuses similitudes avec le travail à distance en temps de pandémie. Comme Icare, nous étions prisonniers de bureaux dans une culture où le présentéisme nous maintenait captifs. Nous avons gagné notre liberté grâce à la croissance généralisée de technologies telles que la visioconférence et l’informatique en nuage.
Malheureusement, le destin d’Icare risque bien d’être également le nôtre si nous oublions la morale de son histoire.
L’inconvénient de la visioconférence
Avez‑vous, vous aussi, « échangé un rôle de figurant dans une guerre contre le rôle d’un personnage principal enfermé dans une cage? ». Ces célèbres paroles de la chanson « Wish You Were Here », un classique de Pink Floyd, reflètent parfaitement l’essence de ce que nous sommes devenus. Nous avons effectivement la liberté de travailler où nous voulons, mais c’est une idée fausse. Nous avons troqué nos bureaux pour nos chambres d’amis et nos canapés et notre place en salle de réunion pour une petite case vidéo sur un écran d’ordinateur.
Rory Sutherland, publicitaire britannique et vice-président d’Ogilvy UK, a fait une plaisanterie devenue célèbre en disant que la visioconférence était une technologie vendue de façon abusive. Nos entreprises nous y contraignent, car elles n’ont pas assez confiance en nous pour que nous montions dans un avion. Si cette technologie avait été présentée comme la façon dont les DG passaient leurs appels téléphoniques, elle aurait pu paraître ambitieuse. « Elle aurait dû être le nec plus ultra de la communication, et non une solution à moindre coût. »
Mais avec l’évolution du travail moderne, la visioconférence a finalement trouvé sa place auprès du grand public. Pour les équipes de vente avec lesquelles je travaille, une journée qui était auparavant remplie de réunions en personne est désormais remplie de réunions virtuelles. Du marketing de produit aux relations avec les clients, jusqu’à notre équipe d’aide à la vente, tout le monde se dispute l’attention de nos vendeurs.
La fatigue associée aux réunions Zoom s’est installée.
Pire encore, les jeunes vendeurs qui débutent n’ont pas le bénéfice d’entendre les conversations téléphoniques de leurs collègues ni de discuter entre deux réunions (ce que j’appelle le « potentiel de la chaise de bureau »). De ce fait, le temps d’adaptation avant d’arriver à une productivité optimale est plus long.
Ce phénomène est parfaitement expliqué par ce que Hermann Ebbinghaus appelle la « courbe de l’oubli ». Sa thèse expose la vitesse à laquelle nous oublions les nouvelles informations au fil du temps, faute de répétition ou de pratique intentionnelle.
Auparavant, nos vendeurs absorbaient des informations comme par osmose, simplement en entendant leurs collègues gérer une conversation épineuse ou en discutant d’une stratégie gagnante devant la machine à café. Ces interactions étaient spontanées, utiles et brèves. En plus, elles n’étaient pas programmées sous la forme d’un appel virtuel d’une demi‑heure nécessitant un ordre du jour et cinq minutes de civilités, et l’attention des participants n’était pas perturbée par les innombrables bips de la messagerie instantanée.
Comme Icare, nous passons de Charybde en Scylla (pour rester dans le thème de la mythologie grecque).
Vous avez saisi l’idée. Mais alors, comment résoudre ce problème? Comment conquérir le cœur et l’esprit de nos représentants commerciaux au milieu du déluge de contenus qu’ils reçoivent?
La technologie est la réponse, mais peut‑être pas comme vous l’imaginez.
Notre héros grec aurait dû apprendre dès l’enfance que quand on joue avec le feu, on se brûle. Le passé nous offre un prisme unique à travers lequel analyser le présent. Mieux encore, comme le reflète très bien la célèbre réplique d’Emmett L. Brown dans Retour vers le futur : « Marty, tu n’arrives toujours pas à raisonner en quatre dimensions! », il faut revenir à une technologie plus ancienne.
La télévision est la solution
La théorie du cerveau prédictif (comme expliquée dans le TED talk de Georg Keller) est l’une des théories les plus populaires sur la façon dont nos cerveaux perçoivent la réalité. De façon simple, notre cerveau génère et actualise sans arrêt des prédictions de ce qui pourrait se passer, en fonction de ce dont nous avons déjà été témoins. Nous avons tendance à passer en mode pilote automatique, sauf si un événement inattendu se produit.
Souvenez‑vous de la dernière fois que vous avez vu un bon film d’horreur. Les personnages marchent dans l’obscurité, dans une maison abandonnée. On entend presque le silence. C’est angoissant. Quand soudain… un bruit. Notre rythme cardiaque s’affole, comme celui des protagonistes. Difficile de ne pas ressentir l’atmosphère.
Chez Dropbox, nous avons beaucoup appris des films et de la télévision, et de leurs façons d’attirer et de retenir notre attention. À tel point que nous avons appliqué certaines de leurs techniques lors de nos appels d’accompagnement. En voici quelques‑unes que nous avons essayées et qui ont bien fonctionné.
1. Mouvement et énergie
Enregistrer des introductions de bonne qualité pour votre appel ou ajouter du mouvement, par exemple en parlant tout en vous déplaçant, provoquera une réaction chez votre public, ce qui vous assurera de capter son attention dès le début de l’appel.
2. Images
Les rappels ponctuels qui s’affichent à l’écran pour indiquer le poste et le nom des intervenants permettent de s’assurer que tout le monde sait qui prend la parole. Leur affichage rapide est également un bon moyen d’attirer l’attention du public.
3. Préenregistrements
La meilleure astuce du monde de l’audiovisuel a toujours été de préenregistrer certains segments d’une émission. C’est un gage de qualité (par exemple, pour une introduction), mais aussi de sécurité et de cohérence pour des intervenants VIP (par exemple, pour une personne dirigeant une entreprise ou la clientèle).
4. Interactions en direct
En préenregistrant du contenu, vous prenez toutefois le risque d’ignorer votre public, et c’est précisément ce que nous voulons éviter. Vous devez donc toujours inclure des moyens d’engagement virtuel classiques, comme des séances de questions-réponses et des sondages faisant participer le public. Ils seront perçus sous un nouveau jour grâce à ce nouveau mode de diffusion de haute qualité.
Aplanir la « courbe de l’oubli »
Bien sûr, nous avons à notre disposition quelques jouets, comme une caméra de qualité professionnelle pour le tournage et une table de mixage pour éditer en direct, qui nous aident à mettre tous ces conseils en place. Mais ne vous découragez pas. Grâce à la puissance des caméras dont nos téléphones intelligents récents sont équipés, à des technologies de diffusion gratuites de haute qualité (OBS studio) et à un bon outil de collaboration multimédia (tel que Dropbox Replay), vous aussi avez la possibilité de mettre en pratique ces tactiques en fonction de votre public avec un faible investissement initial. Essayez-le!
Nos ailes sont déployées et nous avons réussi à voler. Nous nous sommes engagés à améliorer nos événements chez Dropbox (là où cela se justifie), et nos chiffres d’engagement le confirment. Cela nous permet d’ajouter un nouvel élément à nos méthodes de travail privilégiant le virtuel. De plus, nous avons ouvert la voie en créant un processus simplifié qui a réduit de moitié le temps investi dans ces appels d’accompagnement pour les équipes de ventes. En somme, le jeu en vaut la chandelle, si l’on sait ne pas trop s’approcher du feu.